Le rugueux de ma plume

Le rugueux de ma plume

Là où le ciel fait l'amour avec la mer

Une petite allée rocailleuse au fin fond d'un village provençal.

Un soleil écrasant qui lui brûle les épaules.

Une chaleur étouffante qui lui embrasse les yeux au point de la faire pleurer…

Elle court dans sa robe courte à fleur rose (ou plutôt jaune tiens! Juste parce que la narratrice a horreur du rose). Avant de partir en vacances "dans le Sud" elle est allée chez le coiffeur pour se faire couper les cheveux au dessus des épaules. Elle en est contente, elle a l'impression d'être une nouvelle fille…Peut-être même une nouvelle femme: c'est ce qu'elle cherche…Enfin, elle croit. Elle soulève ses cheveux et tente de les coller à sa nuque pour les mouiller de sueur. Elle est heureuse, elle a l'impression d'être Isabelle Adjani dans l'Eté meurtrier. Elle prend un air désinvolte et passionné. Parfois, quand elle croit être seule, elle prend un crayon qu'elle taille juste à la bonne longueur et fait semblant de le fumer pendant une heure. Par contre, quand elle se croit entourée, elle tente de capter les regards. Quand elle était petite, ça marchait. Elle tombait à terre, s'écorchait les genoux presque exprès parce que le sang innocent d'un enfant impressionne les adultes. Elle hurlait de douleur comme Esméralda qui ne peut plus danser car le bourreau lui a broyé les chevilles…Elle se cassait les dents rien que pour admirer les yeux du dentiste au dessus des siens. Mais aujourd'hui l'émaille est toujours brisé et Phébus ne semble pas trouver cela charmant. C'est pour ça qu'Esmeralda a changé de dentiste. Elle essaye de réparer ses erreurs de jeunesse en faisant un détartrage hebdomadaire. C'est une conduite très responsable pour une ado de 16 ans!

Pour le moment, elle court. Pas trop vite car elle a peur d'être moins séduisante au bout du chemin et la rue est courte. Elle arrive dans un cul de sac. Ca la déprime les impasses mais en même temps ça n'engage à rien: il n'y a pas le choix. Elle rebrousse chemin à contre cœur après s'être effondrée contre le mur rocailleux telle Carmen frappée en plein cœur…Mais soudain, elle a honte. Honte d'usurper l'identité de cette héroïne là. Elle sait qu'elle n'aurait pas eu le courage de Carmen. Car il y aurait bien un second choix devant l'impasse…Elle se console un peu en se disant que ses fantasmes à elle n'en valent pas la peine. Elle fait demi-tour, dégoûtée d'être ce qu'elle est.

Maintenant il est tard, elle est assise dans la petite cabane au fond du jardin, celle qui est si étroite qu'on n'y voit que la mer. Elle retire avec classe un crayon se ses lèvres et se met à siffloter doucement, puis plus fort, de plus en plus fort. Tellement fort qu'elle réveille tous les oiseaux de la Riviera. Ca y est, elle sait quel est son destin. Cette chaude et traînante soirée d'été lui a révélé sa vocation!

Depuis ce jour là, tous les soirs dans sa grande villa elle quitte ses fantasmes et un luxe immérité pour aller accorder le chant des oiseaux…Comme on accorde une guitare, elle les guide dans leurs vocalises. Elle ne sait pas si sa carrière ira loin…Elle s'accorde juste un moment de vie réel sans se demander si la société lui donnera raison ou tort. Elle a trouvé quelque chose qui lui plaît sans artifice, sans noblesse…Elle est tout à fait désintéressée. Elle n'attend qu'une chose des oiseux quand elle regarde le ciel: qu'ils l'emmènent là où le ciel fait l'amour avec la mer…



13/04/2010
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